Adelin Donnay avait faim de peinture, une de ces faims qui vous transcende, vous pousse à sauter dans l’inconnu. Il s’en est allé aux Beaux-Arts de Liège se confronté avec cette discipline. André Delalleau (son professeur) l’a bien compris et sans l’influencer, mais en l’accompagnant, il lui a permis de devenir le peintre authentique que nous connaissons aujourd’hui. Après quelques années se fût l’accident, l’accident cardiaque. Difficile de savoir s’il ne serait pas redressé seul, mais il prétend que c’est par l’exposition commune que l’envie frénétique est revenue de produire. Quoi qu’il en soit, pour cette exposition, l’Adelin affaiblit, c’est jouer de l’handicape passager en assemblant les dessins comme pour recoller les morceaux d’une aventure brisée.
Adelin Donnay ayant vu passer, non loin de lui, la grande faucheuse, il se devait de traduire cela avec force. Il s’est concentré avec acharnement sur ceux qui lui avaient évité le grand saut. Ses œuvres simplement fortes ont été un choc profond. Les petits formats d’Adelin Donnay vous sautaient au visage et vous renvoyaient à vos propres interrogations sans vous donner la moindre chance d’esquiver l’attaque.
L’homme a grandi, le peintre a évolué, mais a gardé suffisamment d’enfance pour prendre un plaisir jubilatoire à triturer les papiers qui passent à sa portée. Quand ce peintre est sans pinceau, les plis et chiffonnades deviennent sa palette. Ses « petits papiers » sont indissociables de l’ensemble de son travail, ils portent la même volonté de crier le monde et l’insoumission de l’adolescence.
Lors de la première série de ‘’Portraits de…‘’, il m’en avait confié la genèse. J’ai su, de suite, qu’il tenait son sujet, mais que la forme allait et devait encore évoluer. Si la noirceur était compréhensible, elle traduisait surtout la volonté de nier tout choix esthétique pour aller droit à l’essentiel. Le but était presque atteint, mais il manquait encore une dimension, voir la dimension. On le sait, l’acte pictural est d’abord un geste physique, un combat avec la toile et pour célébrer la vie le geste doit être ample et juste. Confronté jusqu’ici aux limites de son espace de travail, il ne pouvait donner la pleine mesure à son ouvrage. Le prêt d’un atelier lui a offert la possibilité de traduire enfin physiquement l’ensemble de son ressenti. Les grands formats d’Adelin Donnay, témoins d’un vécu, étaient nés. Il nous avait pris à la gorge avec ses premiers « Portraits de… », il n’a cessé depuis de découper, de chiffonner, de coller et puis aussi d’écrire. Mais son écriture reste un geste, comme pour Henri Michaux, le geste d’une plume formant un amoncellement de signes qui dote et enrichit ses « Portraits de… » d’une histoire qu’il nous propose de ressentir à demi-mot. Les amoncellements de signes d’une typographie toute personnelle arrivent à vivre également seuls par la volonté féroce d’exister tout en nous poussant vers nos questions archétypales. Il ne cherche pas, il vit et nous interpelle.
La fleur, pour lui, n’est pas un prétexte, mais bien une réalité surtout quand celle-ci est chargée de symbole comme le coquelicot. La fleur pour lui est, lorsqu’elle réapparait, l’aboutissement d’un cycle et une victoire de plus. Savoir discrètement passer l’hiver ou préférer sécher au soleil pour mieux illuminer notre regard dès que la lumière et l’eau sont bénéfique à la vie, vivre malgré tout en sachant qu’il faudra bientôt recommencer. Mais ce miracle perpétuel est aussi celui d’Adelin Donnay, qui aborde chacune de ses œuvres en cristallisant avec fulgurance les acquis de son expérience picturale. Même fragile la fleur existe, la peinture d’Adelin vit par sa volonté de se réinventer. Il n’est pas une grande gueule, il travaille, travaille encore et toujours…
Son écriture est celle du ressenti comme pour nous convaincre que les plus grandes passions sont muettes.
Fabris Remouchamps … début 2019
Série Exodus
Dans le travail d’Adelin Donnay la proposition est toujours
frontale pour ne pas dire simple, cette série « Exodus » n’échappe
pas à la règle. Mais derrière cette lisibilité directe, le bougre, nous cache
un humanisme contenu.
C’est bel et bien une retenue, mais d’une pudeur étrangement criante, qui
semble ne pas parler de lui. Elle parle plutôt de nous, nous parle en suggérant
avec force l’interrogation, pour finir par poser la question à l’envers.
Ne sommes-nous pas tous ces migrants, les groupes de personnages semblant
avancer avec les hésitations que nos peurs et nos doutes provoquent.
Fabris Remouchamps, le 02/02/2020
Exodus : Carton de vie – Vie de carton
Si découvrir l’homme est un plus, voir ses œuvres simplement fortes est en soi un choc profond. Les travaux d’Adelin Donnay vous sautent au visage sans vous donner la moindre chance d’esquiver l’attaque.
Quand sous ses fenêtres il a vu passé quotidiennement le flot de migrants, vu sa sensibilité et son empathie, traiter le sujet devint une obligation morale….
Avec une pudeur étrangement criante, sur les mêmes cartons que transportent les migrants pour s’assurer un précaire confort nocturne, Adelin couche l’incertitude forcée par l’errance. En les assemblant sur un mur, cet artiste inquiet nous propose le puzzle de notre propre conscience. Ne sommes-nous pas tous ces migrants ? Les doutes et les cauchemars, de ces hommes et ces femmes, ne sont-ils pas légitimement aussi les nôtres ?
Fabris Remouchamps – 19/04/2021
Livre pauvre : Carton de vie – Vie de carton
Un livre c’est une conversation privée, intime et sacrée…. cette conversation est infinie, pour la stimuler, il suffit d’ouvrir à nouveau le livre.
Fabris Remouchamps 23/04/2021
Préface expo La Louvière
Son écriture est geste, ses portraits sont anonymes et l’exode est incertains… Adelin Donnay nous délivre, sans détour, un travail où le geste pictural est élevé au rang d’arme de destruction de nos certitudes. Quel que soit le support le pinceau trace son rapport à la vie. Usant d’une pudeur étrangement criante, il nous balance avec talent les aspérités de l’existence que nous tentons d’enfouir.
Fabris Remouchamps – 01/06/2021
Adelin Donnay est né artiste mais cela ne suffit pas,
l’homme doit vivre d’essais en erreurs, se perdre pour mieux se retrouver, grandir et murir n’est pas simple. Le peintre a dû travailler et travailler encore pour évoluer, mais il a gardé suffisamment d’enfance pour prendre un plaisir jubilatoire à peindre sur les papiers qui passent à sa portée.
La première série ‘’ Portraits de … ‘’ est un tournant, une renaissance qui va accroître son besoin frénétique de produire, peindre ou dessiner sur toutes les surfaces disponibles est devenu un besoin presque vital. Mais n’allez pas croire que cette abondante production est devenue mécanique, bien au contraire, se remettre en question ou plutôt questionner sa sensibilité est le quotidien d’Adelin Donnay.
Conjuguer geste acquis et sérendipitè pour servir l’émotion d’une rencontre, d’un constat, d’un écœurement ou d’une révolte est au centre de son travail.
L’écriture s’invita progressivement dans travail, comme pour vouloir communiquer d’avantage, être certain d’utiliser tous les moyens de nous dire, nous délivrer ce qui le taraude . Mais son écriture reste un geste, comme pour Henri Michaux, le geste d’une plume formant un amoncellement de signes qui dote et enrichit ses « Portraits de… » d’une histoire qu’il nous propose de ressentir à demi-mot. Les amoncellements de signes d’une typographie toute personnelle arrivent à vivre également seuls par la volonté féroce d’exister tout en nous poussant vers nos questions métaphysiques.
Il ne cherche pas, il vit et nous interpelle.
Fabris Remouchamps – 05/06/2021
Ne sommes-nous pas tous des migrants ?
Les œuvres d’Adelin Donnay simplement fortes sont un choc profond. Il n’invente pas des histoires, il les vit. Quand sous ses fenêtres il a vu passé quotidiennement le flot d’immigrants, sa sensibilité et son empathie l’obligeaient à traiter le sujet en suggérant « Ne sommes-nous pas tous ces migrants ?». Les personnages semblaient avancer avec les hésitations que nos peurs provoquent, l’actualité à amplifier le nombre de ces êtres en errance. Les petits groupes ont finis par former des cortèges en quête d’ailleurs paisibles. Mais le chemin en noir et blanc serpente dans le brouillard, l’horizon en lavis s’éloigne toujours en peu plus comme si nul ne pouvait trouver le repos. Les cortèges chancelants sont autant de masses ondulantes, comme les rideaux soumis à un courant d’air. Traduire d’un pinceau ému l’actualité, dénoncer l’abandon presque universel de tout sentiment d’humanité est le travail actuel d’Adelin Donnay.
Fabris Remouchamps – 26/02/2022
L’humain a toujours été présent dans la travail d’Adelin Donnay.
Mais il s’est inventé une solution pour rendre cette présence anonyme, cette pudeur est sa manière de prendre à son compte la souffrance.
Son attaque du portrait est épicène et collective, tout et tous ont droit au même traitement et le résultat est une quête silencieuse d’universalité qui fait mouche.
Le geste de l’artiste frappe à un endroit et le reste de la feuille ou de la toile devient notre monde sans qu’il ait besoin de le représenter. A force de nous en dire peu Adelin Donnay est arrivé, même en un seul portrait, a mettre humain au pluriel.
Fabris Remouchamps – 04/04/2022
Trop de choses en tête
Pour Adelin Donnay, les toiles sont les pages d’un agenda personnel où le temps s’écrit par chapitre.
Trop de choses en tête n’a pas échappé à cette règle quotidienne.
Le contour d’une tête marquait le début de la journée, insérer les notes de bas de page qui tourmentent l’esprit en les ordonnant tant bien que mal était la quête de ces longues heures.
Si tourner la page était la volonté, les questions embrumaient la perception et le manque de conclusion possible embourbait le chemin.
La glaise qui s’accumulait aux chaussures au fil des jours, agaçait, mettait en rage et désespérait.
L’acceptation passa par la désacralisation des objets des chapitres précédents, peindre par-dessus devint le geste libérateur.
Voir renaître les arbres sous le pinceau marqua la fin du chapitre « Trop de choses en tête ».
Fabris Remouchamps – 03/2023
Eupen Galerie Fox
Adelin Donnay nous avait pris à la gorge avec ses premiers ‘’portraits de… ‘’ par l’encre noire et le geste brut. Depuis cette période, cet authentique peintre, n’a eu de cesse d’enrichir son écriture. Ramener progressivement la couleur et la matière dans son travail à été la préoccupation dans sa quête visant à libérer une sensibilité contenue.
Adelin Donnay ne fait pas les choses à moitié et il sait que quel que soit le chemin le point de départ ne s’oublie pas, il nous offre maintenant ses paysages, non pas revus et corrigés, mais augmenté par sa pratique picturale. Ce diable a poursuivi son travaille comme s’il avait, à l’instar de Monet, planté son chevalet à côté de celui d’Eugène Boudin. C’est a dire peindre avant tout, modeler la matière colorée avec le geste du pinceau sans perdre son identité.
En une seule peinture, il lui arrive de résumer la picturalité de plusieurs siècles.
Oui ce diable, nous surprend toujours tout en restant fidèle à sa vision du travail.
Fabris Remouchamps 05/2024